Terminus Belz

Se pourrait-il que la révélation 2014 du polar français nous vienne des éditions Liana Levi ?

En tout cas le premier coup de coeur du genre de cette année est bel et bien Terminus Belz, d’Emmanuel Grand, nouvel auteur qui va sans doute faire parler de lui.

Ce thriller raconte la traque d’un clandestin, Marko Voronine, qui pour échapper à la mafia va trouver refuge sur l’île de Belz, au large des côtes bretonnes (une île imaginaire inspirée entre autres par l’île de Groix). C’est tout le sel du roman : c’est sur cette île que le thriller va prendre une nouvelle dimension et emprunter subitement sa trame aux plus sombres légendes bretonnes. La transition et le mélange des genres étaient osés, mais l’auteur réussit justement à nous faire passer d’un univers à l’autre en toute crédibilité, grâce bien-sûr à un scénario travaillé et un rythme sans failles, mais aussi en raison d’une savoureuse galerie de personnages, du mafieux russe ultra-violent au breton roublard taillé dans le granit. En sachant alterner l’humour et la gravité suivant les situations, Emmanuel Grand parvient avec justesse et un équilibre remarquable à nous emmener de la dure et concrète réalité de notre monde aux portes du merveilleux, à la frontière du jour et de la nuit, dans l’ombre mystérieuse et terrible de l’Ankou.

En alliant le meilleur du thriller contemporain aux plus belles pages d’Anatole Le Braz, Terminus Belz est un voyage décoiffant aux limites du connu, une parfaite fusion des styles et des cultures, et un hommage magnifique à la Bretagne insulaire.

Nous sommes très heureux de vous inviter à venir rencontrer l’auteur à la librairie, qui répondra volontiers à toutes vos questions concernant l’élaboration de son roman, lors d’une séance de dédicace autour d’un buffet le samedi 15 février à partir de 18h.

Venez nombreux !

Terminus Belz, Emmanuel Grand, éditions Liana Levi 19 €.

Deux Actes Noirs à consommer sans modération !

Rendez-vous cette semaine chez Actes Sud, pour deux excellents polars qui apportent une bouffée d’air frais au genre.

Mon premier est français et se déroule sous le règne de Louix XV.

Casanova et la femme sans visage risque de donner des sueurs froides à Jean-françois Parot ! En 1757, une femme est retrouvée morte en plein Paris, totalement défigurée. Cette enquête est confiée à Volnay, nommé récemment commissaire aux morts étranges par le Roi lui-même. A lui de résoudre ce crime inexplicable, aidé pour cela d’un moine hérétique adepte des autopsies. Mais les choses se compliquent et l’enquête se transforme vite en un dangereux panier de crabes : une lettre portant le sceau du Roi est retrouvée sur la défunte, laquelle semble faire partie de l’entourage de la Cour. La marquise de Pompadour décide d’y mettre son grain de sel, pendant que dans l’ombre s’agite une société secrète qui rêve de renverser la monarchie. Il ne manquait plus que Casanova s’en mêle !

Ce roman policier historique d’Olivier Barde-Cabuçon est irrésistible ! Les dialogues sont piquants, la langue n’est pas en reste, et la reconstitution de cette époque monarchique, un rien décadente, dont le pouvoir s’effrite est brillante.Le début réussi d’une série très prometteuse.

Casanova et la femme sans visage, Olivier Barde-Cabuçon, éditions Actes Sud (coll° Actes Noirs) 22.50 €.

Traversons la Manche maintenant.

Mon deuxième est anglais et se déroule à Londres de nos jours… quoique !

Cette fois-ci c’est un homme mutilé qui est retrouvé dans un cimetière de Londres. Au cours de l’autopsie un code étrange est retrouvé gravé à même la peau. Peu à peu il semble que ce meurtre soit lié à une autre série, dont le mode opératoire est pourtant différent. La police est interloquée car le code semble faire référence à un classement pratiqué dans les archives nationales. Aidé d’un généalogiste dont la carrière bat sérieusement de l’aile, l’inspecteur Grant Foster va comprendre que cette suite de meurtres fait écho à d’autres crimes ayant eu lieu à Londres mais… au XIXème siècle !

Avec un talent monstre et un sens de l’humour so british, Dan Waddell nous entraîne dans une enquête palpitante au coeur des archives de Londres. Ajoutez à cela une galerie de personnages aussi attachants que gentiment déglingués, et vous obtenez le meilleur polar en poche du moment ! Une série qui s’annonce là aussi rafraîchissante, surprenante et addictive.

Un grand merci à Ségolène d’Actes Sud qui m’a fait découvrir ces deux pépites !

Code 1879, les enquêtes du généalogiste, Dan Waddell, Babel Noir Actes Sud 8.50 €

(le 2ème volet, tout comme le premier, est disponible en broché aux éditions du Rouergue)

Les Fleurs de l’ombre

« Ceci n’est pas l’histoire d’une petite fille qui disparaît. C’est l’histoire d’une petite fille qui réapparaît… »

Ce refrain qui refait surface à différents passages du dernier roman de Steve Mosby, est comme une comptine macabre et obsédante, qui finira par vous faire littéralement frissonner.

Il arrive que la réalité inspire des romans. Rien d’extraordinaire à cela. C’est le cas de La Fleur de l’ombre, un thriller écrit en 1991 par un illustre inconnu, Robert Wiseman, lequel a disparu dans d’étranges circonstances. Mais il peut arriver que la réalité rejoigne la fiction en s’inspirant à son tour d’un roman. C’est ce que constate Neil Dawson, dont le père romancier vient lui aussi de disparaître. Voilà que des similitudes apparaissent entre le roman, la vie de Robert Wiseman, et celle de Neil et de son père. Cela fait beaucoup de coïncidences. D’autant que sa compagne vient de se faire kidnapper.

Un sur deux, le premier roman de Steve Mosby, publié à l’époque par les toutes jeunes éditions Sonatine, m’avait bien plu. Ayant fait l’impasse sur le deuxième, je me suis laissé tenté par le troisième. N’y allons pas par quatre chemins, c’est un très bon thriller, à l’intrigue déroutante, inquiétante, magnitude 10 sur l’échelle du suspense. Mais avec un charme en plus : l’écriture. En construisant son livre au milieu d’un jeu de miroirs, on finit par ne plus dissocier la réalité de la fiction. Sans pour autant se perdre.

Avec ses mises en abîme audacieuses et son ambiance « creepy » à la Twin Peaks où plane l’ombre du meilleur de Stephen King, Steve Mosby vous embarque dans sa sombre réalité sur les traces d’un tueur en série d’un genre très particulier.

Les Fleurs de l’ombre, Steve Mosby, éditions Sonatine 20 €